membre de l'IRNC et Président du Centre de ressources sur la non-violence de Midi-Pyrénées.
À propos du "Dictionnaire de la non-violence" de Jean-Marie Muller
« Ce qui se conçoit bien s'énonce clairement
Et les mots pour le dire arrivent aisément »
Boileau, Art poétique, chant I
Écrivain et militant, Jean-Marie Muller travaille depuis plus de trente-cinq ans à clarifier la signification de la non-violence. Ses nombreux ouvrages tant sur la philosophie de la non-violence que sur la stratégie de l'action non-violente témoignent d'une recherche inlassable pour sortir la non-violence des malentendus et des confusions où elle est restée longtemps enfermée.
« Ami de la non-violence » tel qu'il se définit modestement, il a contribué au fil de toutes ses années de réflexions et d'actions à rendre crédible l'hypothèse de la non-violence. À rendre la non-violence « discutable, c'est-à-dire digne d'être discutée », selon une formule qu'il affectionne. Tout au long de ses débats et de ses combats, de ces milliers de pages écrites sous le double sceau de la rigueur et de la pédagogie, il a su trouver les mots justes, les formules percutantes, les définitions rigoureuses, les raisonnements subtils, les analyses et les commentaires incisifs, les arguments définitifs qui ont permis à ses lecteurs et ses interlocuteurs d'accéder à « une compréhension approfondie de la non-violence ».
Il faut rendre hommage à Jean-Marie Muller de nous offrir cet indispensable travail de clarification de la non-violence qui ouvre de nouveaux horizons pour penser et agir autrement face à la culture de violence qui domine nos civilisations.
En publiant son Dictionnaire de la non-violence, Jean-Marie Muller demeure fidèle à l'intuition de départ qui a fondé son engagement dans la non-violence : la non-violence n'est pas seulement une protestation, une résistance contre la violence, mais elle est aussi une force de proposition pour construire un avenir libéré de la violence.
« La non-violence ne vise pas seulement la mise en œuvre de moyens d'action capables de résoudre les conflits sans avoir recours à la violence meurtrière, elle vise aussi l'élaboration d'un mode de vie, d'une manière d'être en société où les relations entre les personnes soient fondées sur la solidarité et le partage fraternel », écrivait-il en 1969 dans son premier ouvrage "L'évangile de la non-violence". Et ce qui frappe immédiatement à la lecture de tous ces articles, c'est leur convergence pour conjuguer de façon réaliste l'exigence morale et l'attitude responsable.
Philosophie et stratégie, pensée et action sont intimement liées et cette articulation féconde demeure en filigrane de tous les articles de ce dictionnaire.
108 mots-clefs puisés dans le champ thématique de la violence et de la non-violence sont exposés dans des articles dont la longueur témoigne de la volonté d'aller au-delà d'une simple définition « brute », synthétique, telle qu'on peut la trouver dans n'importe quel dictionnaire. Chaque mot fait l'objet d'un développement conséquent.
Le fait même que l'auteur ait refusé la facilité d'accumuler les citations et les exemples historiques donne encore plus de rigueur et de concision à l'écriture. Souvent l'auteur a recours à l'étymologie du mot défini, soit pour mieux en saisir le sens profond, originel, soit pour mieux mettre en relief les déformations sémantiques que la culture de la violence dominante lui a fait subir. Il s'agit bien d'un dictionnaire philosophique, à la manière de celui de Voltaire, qui donne matière à penser, à questionner et à remettre en question pas mal de nos certitudes bien ancrées.
« Nous devons délégitimer et déconstruire les mots justifiant la violence et, dans le même mouvement, inventer et créer les mots qui honorent la non-violence », écrit l'auteur dans son avant-propos. Jean-Marie Muller élabore au fil des pages une langue que nous n'avons jamais eu la chance d'apprendre et que donc nous ne parlons pas.
En effet, où sont aujourd'hui les écoles, les universités, les forums où l'on « enseigne » la langue de la non-violence ? Le grand mérite de ce dictionnaire est non seulement de définir, de clarifier, d'expliquer la non-violence, mais plus encore, de préciser un vocabulaire et de structurer une grammaire qui rendent possible le parler de la non-violence. C'est plus qu'un ouvrage « sur » la non-violence, c'est un lexique pour apprendre à nommer, à dire, à écrire, à dialoguer, à questionner, à raisonner, à penser avec la langue de la non-violence. Cette langue « étrangère » à notre culture, elle s'impose désormais comme une évidence pour peu qu'on prenne la peine de l'apprendre !
C'est ainsi que le dictionnaire s'efforce de préciser les mots qui fondent la culture de la violence, car « trouver les mots justes pour dénommer la violence, c'est déjà nous déprendre de son emprise ».
Les différentes facettes de la violence peuvent être ainsi repérées :
- la violence politique (« Etat », « Justice », « Peine de mort », « Terrorisme », « Torture »),
- la violence sociale (« Délinquance », « Police »),
- la violence culturelle (« Histoire », « Idéologie »),
- la violence militaire (« Armes nucléaires », « Guerre », « Ventes d'armes » ),
- la violence économique ( « Mondialisation » ),
- la violence religieuse (« Intégrisme »).
Dans le même temps, le dictionnaire défriche les mots qui fondent la culture de la non-violence, car « trouver les mots justes pour dénommer la non-violence, c'est déjà lui ouvrir un espace où elle puisse exister ».
Les multiples dimensions de la non-violence sont développées :
- la philosophie ( « Bonté », « Courage », « Morale », « Pardon », « Vérité » ),
- la spiritualité ( « Amour », « Réconciliation »),
- la stratégie (« Action directe », « Non-coopération », « Désobéissance civile »),
- la politique (« Anarchisme », « Autogestion », « Démocratie », « Ecologie », « Pouvoir » ),
- la paix (« Désarmement », « Dissuasion civile », « Transarmement »),
- la gestion des conflits (« Médiation », « Relation »).
Contrairement à une idée bien ancrée qui laisse croire que la non-violence est une idée simpliste, l'auteur affirme qu'« en réalité, c'est la violence qui est simple et la non-violence complexe ».
Les 108 mots-clefs choisis pour ce dictionnaire nous permettent demesurer toute la complexité de la non-violence . Lorsqu'on s'essaie à expliquer la non-violence, les questions affluent, toujours plus pressantes, toujours plus insistantes. Les militants de la non-violence le savent bien qui ont à répondre à ces questions. C'est un exercice redoutable, épuisant, parfois décourageant tant il est difficile d'aller à rebours d'opinions (car en réalité il ne s'agit pas de convictions) solidement ancrées dans une Histoire qui a toujours fait la part belle à la violence. Il n'a jamais été facile et il ne sera jamais facile d'expliquer « simplement » ce qu'est la non-violence.
Le dictionnaire a le grand mérite d'appréhender toute cette complexité, de lui donner du sens, de la relier au réel tout en montrant l'idéal qu'elle incarne. Ces 400 pages ont véritablement le mérite d'aller au bout de la réflexion philosophique et politique sur la non-violence dont Jean-Marie Muller nous dit qu'elle a l'ambition de « civiliser la vie ».
Jean-Marie Muller signe ici son ouvrage le plus abouti sur la non-violence. C'est d'ores et déjà l'ouvrage de référence, le socle à partir duquel les débats sur la non-violence peuvent désormais se construire dans la clarté.
Il faudra du temps certainement pour que ce trésor soit assimilé, mais il existe et notre responsabilité est de le faire connaître.
Il constitue un remarquable outil pédagogique qui offre à chacun les éléments conceptuels nécessaires pour comprendre et surtout pour s'engager dans la voie de la non-violence, cette « sagesse pratique » qui constitue une véritable espérance dans un monde toujours aussi malade de la violence.
Le 10 novembre 1998, l'Assemblée générale des Nations-Unies « proclame la période 2001-2010 Décennie internationale de la promotion d'une culture de la non-violence et de la paix au profit des enfants du monde ».
Dans ses attendus, elle considère « qu'une culture de la non-violence et de la paix favorise le respect de la vie et de la dignité de chaque être humain sans préjugé ni discrimination d'aucune sorte ».
En outre, l'Assemblée générale « invite les États Membres à prendre les mesures nécessaires pour que la pratique de la non-violence et de la paix soit enseignée à tous les niveaux de leurs sociétés respectives, y compris dans les établissements d'enseignement ».
Il y a lieu de s'étonner que les représentants des États rassemblés à New-York aient voté pareille résolution, tant la non-violence est étrangère à la culture dont nous sommes les héritiers. Les concepts autour desquels notre pensée s'ordonne et se structure laissent peu de place à la notion de non-violence, tandis que la violence fait partie intégrante de notre univers conceptuel. La non-violence vient bouleverser nos repères. Le concept même de non-violence rencontre dans nos esprits de telles difficultés que nous sommes souvent tentés d'en récuser la pertinence.
De la non-violence, les gens n' ont le plus souvent qu'une opinion c'est-à-dire un pré-jugé. Ce qui caractérise une opinion, c'est qu'elle n'est point l'oeuvre de la raison, mais de la croyance. L'opinion est une pensée borgne, stéréotypée, empruntée au plus grand nombre, une pensée à laquelle l'individu n'a pas consacré le temps nécessaire de la ré-flexion. L'opinion n'est que redite de ce qu'« on» dit. Elle nourrit un bavardage. Immature, superficielle et confuse, elle induit en erreur.
L'opinion publique ne laisse-t-elle pas entendre que la non-violence n'est rien d'autre qu'un idéalisme sans mains ? Celui-ci s'enracinerait dans une morale de conviction, mais il serait impuissant à fonder une morale de responsabilité. Alors, à quoi bon ? ! Ainsi, nombre de gens sont prêts à donner une opinion sur la non-violence, tandis qu'ils n'en ont aucune connaissance.
Pourtant, les noms et les visages de Gandhi et de Martin Luther King, même s'ils évoquent le plus souvent des personnages lointains, sont connus et respectés. Une expérience, chèrement acquise dans des luttes d'une nouvelle facture, a révélé au monde l'efficacité de la stratégie de l'action non-violente pour permettre aux hommes et aux peuples de mettre en échec la puissance des violents, de défendre leur liberté, de recouvrer leur dignité. Cette efficacité, ne nous leurrons pas, restera toujours relative et l'échec sera toujours possible. Mais l'action non-violente, en réintroduisant du sens dans les luttes qui opposent les hommes, permet d'avoir une attitude responsable face à la violence des puissants.
Il arrive parfois que l'actualité cite la non-violence dans la présentation des événements. Mais ce n'est qu'un flash s'éteignant aussi vite que l'intuition qui parfois ...
Avant-propos
Accompagnement
Action directe
Agressivité
Amour
Anarchisme
Animaux
Antimilitarisme
Annes nucléaires
Autogestion
Autoréduction
Autorité
Bonté
Boycott
Clandestinité
Conflit
Contrainte
Corps
Courage
Culture de la non-violence
Défense civile non-violente
Délinquance
Démocratie
Désarmement
Désobéissance civile
Dialogue
Dissuasion civile
École
Écologie
Éducation
Efficacité Enfance
Esprit de défense
État
Femme
Force
Grève
Grève de la faim
Grève de la faim illimitée
Grève générale
Guerre
Histoire
Humour
Idéologie
Intégrisme
Interposition
Intervention civile
Jeu de rôles
Justice
Leader
Lutte
Luttes sociales
Marche
Médiation
Mondialisation
Morale
Mort
Moyens
Nécessité
Négociations
Non-coopération
Non-violence
Obéissance
Objectif
Objection de conscience
Obstruction
Opinion publique
Organisation
Pacifisme
Paix
Pardon
Parole
Peine de mort
Pétition
Peur
Philosophie
Police
Politique
Pouvoir
Prison
Programme constructif
Réconciliation
Reconversion
Refus de l'impôt
Relation
Répression
Résistance
Respect
Sabotage
Sacrifice
Sanctions économiques
Sécurité commune
Service d'ordre
Sit-in
Spiritualité
Stratégie
Tactique
Terrorisme
Théâtre-tract
Tolérance
Torture
Transarmement
Ultimatum
Universel Usurpation civile
Ventes d'armes
Vérité
Vigilance
Violence
Institut de recherche sur la Résolution Non-violente des Conflits (IRNC)
http://www.irnc.org
Centre de ressources sur la non-violence de Midi-Pyrénées
http://www.non-violence-mp.org
Non-Violence XXI
http://www.nonviolence21.com
Alternatives Non Violentes
http://www.irnc.org/ANV
Mouvement pour une Alternative Non-Violente (MAN)
http://www.manco.free.fr
Institut de Formation du MAN (IFMAN)
http://www.ifman.free.fr
Coordination française pour la Décennie
http://www.decennie.org
Non-Violence Actualité
http://www.nonviolence-actualite.org
Génération médiateurs
http://www.gemediat.org
Centre pour l'action non-violente (Suisse)
http://www.cmlk.ch
Université de paix (Belgique)
http://www.universitedepaix.org
La culture de violence qui domine nos sociétés ne nous pas appris une autre langue. Pour la première fois, ce "Dictionnaire de la non-violence" nous présente les mots-clés d'une philosophie qui donne sens à l'existence et une stratégie qui permet l'efficacité dans l'action.
Jean-Marie Muller a voulu à la fois rassembler dans ce lexique les éléments d'un "traité de philosophie de la non-violence" et d'un "manuel pratique de l'action non-violente".
Il existe en effet un lien essentiel entre le mot juste, la pensée juste et l'action juste.
Jean-Marie Muller est directeur d 'études à l'Institut de recherche sur la résolution non-violente des conflits (IRNC). Philosophe et écrivain, il parcourt le monde à l'invitation des mouvements de défense des droits de l'homme.
Le dictionnaire qu 'il publie aujourd'hui est le fruit de quelque trente-cinq ans de réflexion et d'action.
Couverture: Maurice Denis: gouache, détail, 1893, coll. privée. DR
Graphisme : Marie de Smedt
Prix: 12 € ISBN : 2-914-916-56-6